Quand Hunter soupira à fendre l’âme et qu’il rétorqua qu’ils n’avaient pas de temps à perdre à chercher de l’eau, Willow fronça les sourcils en le regardant bien en face. Pas de sourire, car sur ce coup-là, il n’en méritait pas. Il pouvait ne pas être d’accord avec son avis, c’était son droit, mais il pouvait aussi exprimer son avis autrement. Et puis, qu’en savait-il, hein? Quelles étaient les odeurs qui attiraient les rôdeurs et lesquelles les repoussaient? Ils n’en savaient strictement rien. Eh puis merde! C’était lui qui avait le satané sac sur le dos, qu’il s’arrange tout seul. Alors Willow lui tourna carrément le dos et alla rejoindre Amy et Ayana. Qu’il se démerde donc tout seul. C’était le cas de le dire.

Une fois arrivée auprès d’Ayana, Willow s’adossa au mur à son tour et croisa les bras sur sa poitrine. Elle ne se mêla pas à la conversation des autres et se contenta de les écouter. Elle était cependant de leur avis, il serait bête de se balader durant la nuit dans une ville infestée de rôdeurs. Ça ne serait pas prudent. Surtout qu’ils étaient invités à loger à l’hôpital s’ils le souhaitaient. Rien ni personne ne les obligeait à se trouver un refuge cette nuit-là. Enfin, ça ne la regardait pas.

Will venait de faire sortir le chien du sac, indiquant qu’il était temps que leur route se sépare. Jane avait parlé du danger dans le stationnement, avant d’indiquer qu’elle n’avait pas l’intension de venir avec eux, ni avec les deux hommes. Kal et Raff ne dirent rien pour l’obliger, mais il pouvait lire la déception sur les visages des deux hommes. Comme il lu la colère de Willow sur le sien. Bon sens, les bonnes femmes, ce que ça pouvait être compliqué. Il n’y arriverait jamais. Non, il ne pouvait pas les comprendre.

-T’en fait pas Jane, on a un ou deux véhicule dans une zone sécurisée. Il faut juste savoir où aller dans le stationnement pour être à l’abri. Nous avons fait exprès de ne pas nettoyer tout l’endroit. La prochaine fois que vous avez besoin, passez nous voir. Nous pourrons vous indiquez où aller. Mais ne diffusez pas l’info.

Le chien semblait très content d’être sortit du sac. Il sautillait un peu partout. Hunter ne put s’empêcher de penser à son propre chien. Mais il chassa vite cette pensée, son chien avait finit dans leur assiette. Il avait préféré le tuer lui-même et nourrir sa famille avec que de le laisser aux zombies et voir les siens mourir de faim. Il ne regrettait pas sa décision, mais regrettait la compagnie du chien.

-Bon, vous avez eu l’invitation, maintenant à vous de choisir si vous venez ou si vous partez, mais faut se décider maintenant car il faut reprendre la route le plus rapidement possible.

On n’avait cessé de nous encourager à nous rendre avec eux à l’hôpital. L’idée me tentait à vrai dire, mais je me sentais déjà endetté par-dessus la tête envers ce groupe. Sans eux, j’arpenterais déjà les rues de Houston à la recherche de victimes frétillantes. Inutile de me sentir encore plus redevable en réduisant leurs réserves de nourriture d’une portion. Will réitéra son intention de partir de son côté et j’espérais que cela couperait court à leur bienveillante insistance, ne sachant pas combien de temps je pourrais encore résister à la tentation d’un lit douillet et à l’abri des zombies.

Mon comparse se tourna ensuite vers moi pour me proposer la garde de Buster. Je haussai un sourcil suite à cette offre. Bien qu’il ne semblait pas aussi friand du chien que moi, le fait de l’avoir découvert ensemble lui donnait le droit à une garde partagée selon lui. Si tu crois que tu auras tous les avantages sans les inconvénients… « Je compte bien repartir avec Buster une fois que nous l’aurons lavé ensemble. » Mon message était clair et avait le mérite de lui signaler que je ne lui imposerais plus ma présence bien longtemps. Will m’avait semblé impatient de se retrouver seul.

J’agitai la main envers mes nouvelles connaissances tout en suivant mon camarade. En passant près de Jane, je lui fis un signe de tête sans rien rajouter de plus. Le « Prend soin de toi » de rigueur à notre époque lui aurait semblé infantilisant et insultant. Jane savait s’occuper d’elle-même et je savais que lorsque je la reverrais, elle aurait toujours l’usage de sa cervelle.

À mes côtés, le chien gambadait comme si toutes les péripéties de la journée étaient déjà derrière lui. Je me mordis la lèvre et fis une entorse à mes habitudes. Je fouillai dans le sac de Will et en sorti sa corde, l’utilisant pour garder Buster sous contrôle. Une fois en laisse, le chien abaissa ses oreilles et me jeta un regard contrit. Voilà l’attitude que tu aurais dû adopter depuis ta petite partie de chasse dans l’armurerie. Mieux valait tard que jamais.

Jane laissa Kaleb remplir son sac tout en levant les yeux au ciel, murmurant tout de même un merci. Elle savait bien que son frère ne la laisserait pas partir les mains vides quitte à lui faire avaler la nourriture sur place mais elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver une certaine gène. Ce qu’elle redoutait finit par arriver. Jane se sentit soudain oppressée, comme étouffée par le jugement et la sollicitude de ses proches. Certains réitéraient cette invitation qu’elle avait déjà entendue mille fois, d’autres ne disaient rien mais la jeune femme était persuadée qu’ils n’en pensaient pas moins. Elle savait que ses faits et gestes influaient sur le moral de Kaleb et Raffael, donc sur le groupe par extension. Son cas faisait probablement jaser à l’hôpital. Elle qui avait déjà du mal à gérer ses deux frères en tête à tête lorsqu’il s‘agissait de tourner les talons en refusant leur aide ne se sentait pas capable d’affronter plus longtemps sa famille presque au complet. Il fallait qu’elle s’éclipse.



Elle tenait néanmoins à répondre favorablement à la proposition de Raffael. Jane avait décidé d’essayer, de se battre et c’était par ses actes qu’elle prouverait à sa famille ses bonnes intentions. Elle opina du chef. Alicia avait besoin d'une telle visite, Jane le ressentait. Elle espérait juste qu'il ne serait pas trop tard pour réparer les pots cassés. « Bien sûr. Je passerai vous voir demain matin pour qu’on s’organise. » La jeune femme positionna correctement son sac sur son dos puis lança un petit sourire à l’assemblée, répondant par la même occasion au signe de tête de Lincoln. «  Ne vous inquiétez pas pour moi, ça ira, comme toujours. Bon courage pour le retour et merci encore. » Jane fit volte face puis prit la route, cap au sud-ouest.

Il regarda les deux hommes qui partaient de leur côté.

-Bonne route!

Les femmes, sauf Jane, semblaient à peu près toutes furieuses, les deux hommes avec le chien partirent de leur côté, Jane du sien. Ne restait plus qu’eux. Amy lui avait demandé de la porter car Raffael était épuisé, mais un regard à son frère lui indiqua qu’il allait continuer. Raffael avait eu une bonne idée cependant. Depuis le temps qu’ils en parlaient, ils allaient aller voir Alicia. Jane avait tout de suite acceptée. Tant mieux.

-Bon, il est temps de reprendre la route pour nous aussi.

Il prit le sac souillé que Hunter avait toujours dans les mains, le vida du plus gros de son contenu avant de le mettre en boule et d’aller vers Mackenzie. Il savait qu’elle gardait toujours un ou deux sacs en plastique dans la petite pochette de son sac à dos. Il en prit un et y rangea le sac mal odorant. Il laissa Raffael reprendre Amy sur son dos, embrassa rapidement Mackenzie, ébouriffa les cheveux d’Ayana avant de reprendre sa place à la fin de la procession. Il avait délibérément laissé son couteau à la petite.

-Bon allez, on y va.