Cinq jours. Il avait compté, ça faisait cinq jours que sa femme était là près de lui et que tout ce qu’il pouvait faire était de l’éviter le plus possible pour ne pas la mettre mal à l’aise. Il avait déjà fait la vie dure à Jane sans le vouloir, il n’allait pas en ajouter en faisant de même pour Livia. Il voulait qu’elle reste ici, dans cet hôpital. Même si elle avait des atouts, le groupe de l’hôtel était assez fermé et pouvait refuser de la prendre avec eux. Que ferait-elle alors? Il n’avait pas envie de la voir vagabonder seule dans les rues, même si ce devait être ce qu’elle avait fait les six derniers mois. Seulement d’y penser il en avait des nausées. Elle avait dû se défendre, probablement seule et lui était confortablement installé dans cet endroit et se la coulait douce. Bien entendu, il avait aidé dans les tâches, avait fait de son mieux pour protéger certains, comme la petite Ayana, mais il ne l’avait pas protégé elle. À sa décharge, il la croyait toujours à New York.

Il s’étira, il avait le plan de l’hôpital et la liste des gardes devant lui mais il était incapable de mettre en place ses hommes et femmes qui avaient offert leur aide pour les tours de garde. Il n’était bon à rien en cette journée. Il avait la tête pleine et ce n’était pas nécessaire de positif. La jeune femme avait dit qu’il n’était jamais allé la chercher, elle l’avait accusé de ne pas l’aimer tant que ça. Ça lui avait fendu le cœur tout simplement. Si elle avait su qu’il était allé, elle aurait peut-être compris. Si elle savait qu’il s’était jeté à corps perdu dans le travail jusqu’à hérité du commandement de son navire, peut-être aurait-elle compris à quel point elle lui manquait et à quel point il souffrait de son absence. Elle n’était pas venue lui demander de précision sur ce qu’il avait dit, mais probablement qu’elle n’avait même pas compris ce qu’il avait voulu dire. Il avait l’impression de lui devoir des excuses, mais en vérité il n’en savait rien. Il avait fait ce qu’il pouvait, la manière directe n’avait pas fonctionné, elle ne prenait pas ses appels, ne répondait pas à ses texto. Il s’était présenté à elle, mais ce qu’il avait trouvé était sa femme riant avec un autre homme.

Qu’aurait-il dû faire? Entrer dans le restaurant et lui faire une crise? Ce n’était pas son genre. Il était resté de marbre quand sa sœur était morte, même chose pour sa sœur. Il était passé maître dans l’art de ne pas laisser ses émotions filtrer et ça lui réussissait la plupart du temps. Pour lui, la laisser partir avait été la plus grande preuve d’amour qu’il lui avait offert. Elle n’était pas bien avec lui, elle semblait si heureuse avec cet homme, pourquoi l’aurait-il égoïstement empêché d’être heureuse avec un autre homme que lui? Il n’avait pas été égoïste, il l’avait laissé partir. Mais après cinq ans, elle lui envoyait cette demande de divorce sans même lui avoir reparlé. Il n’avait pas voulu signer. Il voulait la revoir une dernière fois. Il avait bêtement cru qu’elle commencerait par négocier avec son avocat, mais il n’avait pas eu le coup de fil de ce dernier et les zombies étaient arrivés. Il en était là dans sa réflexion lorsqu’il vit un mouvement devant sa porte. Il la laissait ouverte très souvent, il aimait voir l’animation du couloir et pouvait réagir plus vite aux mauvaises surprises. Un éclair blond venait de passer dans son champ de vision. Il aurait pu reconnaître la jeune femme les yeux fermés. Elle semblait hésiter ou alors peut-être se faisait-il des idées.

-Entre Livia.

Il savait que c’était elle, il n’avait même pas eu à regarder complètement. Il repoussa les papiers devant lui. Il l’avait laissé venir à lui, mais il savait qu’ils devraient discuter un jour. Il prit sa balle de tennis, il en aurait besoin car son niveau de stress venait de monter en flèche. Ils avaient beau vivre dans des conditions relativement difficiles, la jeune femme était toujours magnifique. Comme dans son souvenir d’ailleurs. Elle avait meilleure mine cependant, les derniers temps, elle avait souvent des cernes sous les yeux. Elle ne dormait pas bien, il le savait même si elle avait tenté de le cacher. Il détestait à ce moment-là partir sur la mer et la laisser derrière. Sans doute aurait-il dû être plus présent pour elle. Au final, elle était partie pour le laisser vivre sa vie et c’était sans aucun doute un peu de sa faute si elle s’était sentie aussi mal. Il se redressa. En ce moment, c’était lui qui ne dormait pas bien et pas seulement parce que le lit de camp qu’il montait chaque soir et démontait chaque matin n’était pas confortable. Non. Il n’avait de cesse de penser à elle et à comment lui faire comprendre qu’il l’aimait vraiment toujours et qu’il ne voulait plus rester une seule journée de plus loin d’elle. C’était une tâche quasi impossible. Elle ne lui faisait pas confiance, ne lui faisait plus confiance depuis tant d’année. Elle n’avait pas cru en lui, c’est pour ça qu’elle était partie. Alors comment pourrait-il faire maintenant?

Olivia ne savait pas ce qu’elle fichait devant le bureau de Len. En réalité, si, elle le savait, c’était juste qu’elle hésitait. Et qu’elle s’était dirigée vers le bureau de son mari sans réellement réfléchir à ce qu’elle faisait. Ses pas l’avaient conduite auprès de Len. Même après avoir passé 5 longues années loin de lui, il était encore la première personne vers qui elle se tournait automatiquement quand elle avait un pépin. Même durant leur séparation, elle avait constamment dû se réprimander, se rappeler qu’elle ne devait pas se tourner vers lui, qu’elle était adulte et indépendante, qu’elle pourrait faire face… mais ça ne changeait rien au fait que sa première idée était toujours d’aller retrouver son mari. Aujourd’hui, les choses étaient différentes. Ils ne s’étaient pas reparlés depuis leur dernière discussion, Len avait tenu parole et n’avait pas réintégré sa chambre, chose que Livia trouvait complètement bête.

Mais aujourd’hui, si elle se retrouvait devant le bureau de Len, c’était pour une bonne raison. Un type avait essayé de se servir dans la réserve de médicaments et Olivia l’avait pris sur le fait… et lui, il n’avait pas vraiment apprécié s’être fait prendre. Il s’était dirigé droit sur elle et lui avait tordu le bras dans le dos et avait cherché à l’intimider pour la faire taire. Si seulement il avait su! Ça ne ferait que la pousser davantage à aller bavasser. Oh, elle ne comptait pas dire que ce type s’était amusé à essayer de lui faire peur – depuis qu’elle avait failli y rester à cause du père de Len, il n’y avait plus grand-chose qui faisait peur à Livia – mais elle comptait bien raconter sa tentative de voler des médicaments. Si Olivia n’avait pris son service en tant qu’infirmière à l’hôpital depuis peu, elle avait rapidement compris que Kaleb et Willow devaient bosser avec peu de matériel et faire preuve de beaucoup d’inventivité pour soigner leurs patients respectifs.

A bien y penser, peut-être ferait-elle mieux de ne pas se tourner vers Len? Il était peut-être le chef de la sécurité, mais si elle parlait de ce qui s’était passé à Kaleb, celui-ci pourrait en parler à Len à sa place. Ce qui l’arrangerait parce qu’elle n’était pas vraiment prête à lui parler. Elle l’avait vu de loin pendant quelques jours et il n’était jamais venu vers elle. C’était peut-être aussi bien comme ça, Livia n’était pas encore prête à reprendre cette conversation là où ils l’avaient laissée. L’entendre lui dire qu’il l’aimait encore n’avait pas été sans faire remonter tout un flot d’émotions. Émotions auxquelles Livia n’était pas encore prête à faire face. Finalement, c’était ça qui lui faisait peur. Si elle n’avait pas eu peur de cette grande brute qui s’était amusée à vouloir l’intimider, se retrouver face à face avec son mari la faisait trembler de tous ses membres.

Elle était devant la porte quand elle le vit travailler. Ce n’était clairement pas le moment le déranger, aussi Olivia décida-t-elle de passer son chemin. Elle raconterait cette histoire à Kaleb, Raffael ou Hunter. À une tête dirigeante et cette personne-là se chargerait de mettre Len au courant de toute l’affaire. Elle veillerait cependant à ce que son nom reste en-dehors de toute cette histoire. Ne manquerait plus que Len se mette à croire qu’elle le fuyait. Ce qui ne serait pas complètement faux, mais tant pis. Elle venait de tourner les talons quand elle l’entendit lui dire d’entrer en utilisant son nom. Évidemment, il avait fallu qu’il sache que c’était elle. Comment il faisait, bon sang?

- Désolée, je ne voulais pas te déranger.

Si elle revint vers la porte, elle n’en franchit cependant pas le seuil et se contenta de s’appuyer contre le cadre de la porte et de croiser les bras sur sa poitrine. C’était ça ou bien enfoncer ses mains dans les poches de son jean.

- Il y a un homme que j’ai surpris à se servir dans la réserve de médicaments. C’est à Kaleb ou à Willow que j’aurais dû en parler, je m’en rends bien compte.

Qu’est-ce qu’elle avait tout d’un coup à essayer de se justifier? Ça ne lui ressemblait pas. Elle aurait dû se contenter de lui faire part de ce qui s’était passé et tourner les talons et regagner ses pénates. Alors pourquoi se sentait-elle incapable de repartir aussi rapidement qu’elle était venue?

La jeune femme parla avant même d’être revenue, elle s’excusait de le déranger. Il la regarda apparaître dans le cadre de la porte. Il dût se dire de respirer. Elle lui faisait toujours le même effet, son souffle manquait quand il la voyait. Elle était tellement près et pourtant si inaccessible pour lui. C’était déchirant de la voir prendre cet air tourmenté. Comme si elle se demandait ce qu’elle faisait là et se disait qu’elle n’aurait pas dû venir. Elle lui confirma ce que son non-verbal lui avait déjà annoncé en disant qu’elle aurait dû en parler avec Kaleb ou même avec Willow. Elle avait surpris un homme à se servir dans la pharmacie. Non, ce n’était pas au doc de régler ça. C’était son rôle à lui. Le médecin en avait déjà pleins les bras avec les blessés, sa famille, sa fille. Non, il pouvait s’occuper de ça. Il secoua donc la tête.

-Tu as bien fait de venir, Kaleb et les autres en ont beaucoup sur les bras. Ils m’ont nommé à la sécurité, c’est à moi de m’en occuper.

Ils voulaient qu’il protège les gens, que l’agression qu’avait subit Ayana et cette gentille fille de la cuisine ne se reproduisent plus jamais. Il pouvait le comprendre. Kaleb était leur seul médecin, il participait au ravitaillement, Willow était vétérinaire, mais elle secondait Kaleb et participait aussi au ravitaillement. Ils n’avaient pas besoin de se casser la tête avec un voleur de médoc. C’était son boulot depuis qu’on l’avait nommé, il le prenait au sérieux. Mais il ne faisait rien sans d’abord leur en parler et il voulait que ce soit clair pour la jeune femme.

-Je leur rapporterai le problème avant d’agir, mais arriver avec des solutions à leur offrir dès le début les empêcheront de se donner un problème de plus en tête.

Il lui fit signe d’approcher pour venir s’asseoir. Il avait besoin de détails pour pouvoir intervenir. Il sentait que la jeune femme serait réticente à l’idée de s’asseoir face à lui, lui-même avait de la difficulté à ne pas s’approcher pour la toucher. Il s’installa bien droit et prit un calepin dans son bureau pour noter les informations qu’elle lui donnerait. Le matériel se faisait rare, mais il fallait quand même qu’il puisse prendre des notes. Il utilisait donc un bon vieux crayon à la mine de plomb et ne gardait rien bien longtemps. Il avait une gomme à effacer. Il prit donc son papier un peu abîmé et regarda la jeune femme.

-Est-ce que cet homme ta fait du mal? Ça l’air banal comme question, mais c’est important. La dernière escalade de violence ici c’est terminé par mort d’homme. On veut éviter ça le plus possible, c’est pour ça qu’ils ont créé mon poste d’ailleurs. Donc, s’il a fait usage de violence sur toi, j’ai besoin d’avoir tous les détails.

Il serra les dents espérant que ce mec n’avait pas touché à un seul cheveu de sa femme. Mais il devait rester de glace, agir de façon professionnelle. Il savait faire ça, mais saurait-il gardé cet air si elle lui dévoilait que l’homme en question lui avait fait du mal? Il le devait, pour elle et pour lui. Elle hésitait déjà à rester à cause de lui, il était hors de question qu’il lui donne des munitions pour choisir de partir. De plus, Kaleb avait besoin de toute l’aide possible et Olivia était une infirmière qualifiée. Il se doutait qu’elle avait dû être autant appréciée à New York qu’elle l’avait été ici à Houston. Elle avait toujours su si prendre avec les patients. Il se souvenait d’être allé la surprendre à son travail, il lui avait dit qu’il arrivait trois jours plus tard que ce qui était vraiment prévu et il s’était rendu à l’hôpital dès qu’il avait mis le pied sur la terre ferme. Il l’avait vu évoluer avec un patient en particulier. C’était un enfant, un enfant qu’elle ne connaissait pas, mais qui semblait être un habitué de l’hôpital selon ce qu’il avait compris. Elle lui parlait, le faisait sourire pour oublier le mal qu’il ressentait pendant que le docteur recousait son bras. Il avait une grande marque. Il ne savait pas ce que cet enfant avait subit pour avoir cette marque, mais il avait vu sa femme traiter avec lui, l’avait vu lui donner un sentiment de sécurité, lui faire oublier un instant qu’il souffrait. Il avait pensé à ce moment-là qu’elle ferait une mère extraordinaire. Ils avaient su un mois ou deux plus tard que ce ne serait pas possible.

Ils auraient pu faire ensemble pour un enfant ce qu’elle avait fait pour celui-ci. Mais elle souffrait et il n’avait pas son talent pour faire oublier la souffrance aux autres semblait-il. Elle était partie sans se retourner. Maintenant, ils étaient là, tous les deux avec leur trou dans le cœur et n’arrivant pas à retrouver cette complicité d’antan. Il leva les yeux vers la jeune femme et planta son regard dans le sien. Un instant, un seul, il avait envie de lui faire comprendre qu’il serait toujours là pour elle et qu’il l’aimait. Son regard ne pouvait pas tout dire malheureusement, mais tant pis. Si elle pouvait en comprendre la moitié, ce serait un pas de plus dans la bonne direction. Il se sentait muselé, les mains et les poings liés face à elle. Il avait peur de trop en dire, elle le lui avait reproché, mais en dire trop reviendrait au même avec Livia. Il le savait. L’un comme l’autre, elle ne le croirait pas tant qu’elle ne réaliserait pas par elle-même qu’il l’aimait de tout son cœur, de toute son âme, de ton son être.

Évidemment, il fallait qu’il ne soit pas de son avis concernant le fait d’avoir dû en parler à Kaleb plutôt qu’à lui. Len marquait cependant un point en disant que le groupe qui dirigeait littéralement l’hôpital avait beaucoup de choses sur les épaules. Ça ne faisait que quelques jours qu’Olivia était là et elle avait déjà compris que cette famille faisait beaucoup plus que sa part dans l’organisation de l’hôpital. Alors oui, elle était d’accord, ce n’était pas vraiment approprié d’embêter Kaleb avec cette histoire-là, mais si ç’avait pu lui éviter cette discussion avec son mari, Livia n’aurait pas été contre. Leur dernière conversation n’était pas terminée et la jeune femme savait que ce n’était que partie remise. Un jour ou l’autre, plus rapidement qu’elle ne pouvait se l’imaginer, ils devraient revenir sur le sujet. Parviendraient-ils à tomber d’accord? Là-dessus, rien n’était moins sûr.

Quand Len lui fit signe d’approcher, Olivia poussa un long soupir de lassitude en levant les yeux au ciel. Et il allait prendre des notes par-dessus le marché si la jeune femme en jugeait par la feuille et le crayon qu’il venait de tirer d’un tiroir de son bureau. A l’eau l’idée de raconter ce qui s’était passé et de repartir aussitôt. Livia connaissait son mari et elle avait immédiatement compris qu’elle ne s’en tirerait pas aussi facile. Dépitée, elle entra dans le bureau alors qu’elle avait fait tout son possible pour l’éviter et s’approcha d’une chaise sur laquelle elle se laissa tomber. Croisant les bras sur sa poitrine, elle attendit qu’il se décide à parler. Il voulait des détails? Qu’il pose des questions!

Bien-entendu, elle aurait préféré que Len passe par-dessus la première question, à savoir si le type lui avait fait du mal. Même si elle ne l’avait pas connu aussi bien, Livia aurait pu remarquer qu’il serrait les dents. C’était systématique chez lui. Il avait ce besoin de protéger les autres bien ancré en lui. Par-contre, il y avait une chose qu’elle ignorait. Quelle serait sa réaction si elle lui disait que le type lui avait tordu le bras et essayé de l’intimider pour acheter son silence? Il était un homme plutôt rationnel, il réfléchissait avant d’agir et ne laissait pas la rage l’envahir, mais dans un cas comme celui-là, qu’est-ce qu’il serait porté à faire? Alors non, elle n’avait pas du tout envie de lui dire ce qui s’était passé.

Olivia vit le regard que lui lança Len. C'était ce regard qu'il avait avant, celui remplit de tendresse, celui qui lui faisait tellement de promesses. Il les avait tenu ses promesses, sans doute aurait-il tenu celle de l'aimer pour toujours, mais elle ne voulait pas le brimer, ne voulait pas être un poids dans sa vie. Elle se sentit littéralement fondre sous le regard de celui qui était toujours son mari. C'était comme avant leur mariage. Au bal, il avait eu ce regard en lui avouant ce qu'il ressentait. Elle avait cru qu'il blaguait et pourtant, il était sérieux. Et maintenant? Pourquoi lui sortait-il ce regard-là? Pourquoi maintenant? Elle le sentait peser sur elle, comme s'il la déshabillait du regard. Elle ressentait le même malaise grandissant que si elle s'était retrouvée nue devant lui sans le vouloir. Vous savez, ce cauchemar que l'on a tous au lycée de se retrouver nu devant une classe complète alors que l'on devait faire un exposé devant la classe? Et bien elle avait cette même sensation à cet instant. C'était Leonard, l'homme qu'elle avait épousé et aimé si fort. Celui qu’elle aimerait probablement toujours. Pourtant elle se sentait comme une idiote devant lui et ne pouvait empêcher son cœur de s'emballer alors qu'il la regardait ainsi.

Mal à l’aise, Livia passa le bout de sa langue sur ses lèvres sèches, se mordilla la lèvre inférieure et décida qu’il valait mieux répondre à sa question plutôt que de le laisser… le laisser quoi? Se rappeler du passé? Ouais, c’était ça. Valait mieux répondre à la question, revenir sur la raison de sa présence dans ce bureau et chasser les images du passé.

- Disons juste que… je lui ai donné un échantillon de ce que tu m’as appris. Avant d’y apporter une toute petite variante de mon cru.

Parce qu’il était souvent absent à cause de son travail, Len avait tenu à ce qu’elle soit en sécurité. Système d’alarme à l’appartement, dispositif de poivre de Cayenne dans son sac à main, mais surtout l’auto-défense. Ce qu’il avait toujours voulu, c’était qu’elle soit en mesure de se défendre si nécessaire, qu’elle ne figure pas au nombre des victimes qui n’avaient pas pu se protéger de leur agresseur. Par chance, jamais elle n’avait eu besoin de mettre en pratique tout ce que Len lui avait appris, mais elle lui avait été reconnaissante d’avoir pris le temps de lui enseigner les bases. Ça lui avait quand même été bien utile quand cette brute lui avait tordu le bras dans le dos. Livia avait fini par se défaire de se prise et lui avait assené un coup de son cru. Devant l’air interrogateur de son mari, la jeune femme ajouta:

- Si jamais il a une copine, il ne pourra pas s’amuser avec elle avant quelques jours. A supposer qu’il soit en état de fonctionner après... parce que j'ai pulvérisé son service trois pièces.

Car ça, Livia en doutait. Elle lui avait donné un sacré coup de pied dans son service trois pièces. Elle devait les avoir littéralement broyées. La jeune femme y avait mis tellement de cœur! Finalement, elle souhaitait à ce pauvre mec d’avoir une femme qui voudrait être comblée. La seule idée de l’imaginer expliquer pourquoi son… attirail était en berne serait presque jouissif.

-Services trois pièces…

Il dû réprimer une envie de rire en l’entendant utiliser cette expression. Cependant, ce qu’il ne trouvait pas drôle, c’était qu’elle avait dû se servir de ce qu’il lui avait appris en auto-défense avant de lui démolir le « service trois pièces » à ce mec. Ce qui voulait dire qu’il l’avait touché, qu’il avait eu l’intention de lui faire du mal. Livia ne se serait pas défendu autrement. Il se leva lentement, elle avait utilisé cette image de service pour lui faire oublier ce que ses propos laissaient entendre. Il s’approcha doucement de sa femme, commença par examiner son cou, elle n’avait pas de marques. Il prit l’un de ses bras et l’examina, rien. Il prit l’autre bras et aperçu des rougeurs au niveau du poignet et en remontant les yeux, il vit qu’elle avait des rougeurs sur l’avant-bras et dans le pli du coude. Il eut un soupir et dans un réflexe complètement spontané, il embrassa les marques sur le poignet d’Olivia. Il dû faire bonne figure, donc ne laissa rien paraître de son trouble suite à ce geste qu’il avait avant qu’elle ne le quitte. Il relâcha doucement le bras de la jeune femme avant de retourner derrière son bureau.

-Désolé.

Ce fût tout ce qu’il put lui dire. Il n’était pas désolé d’avoir posé le geste, il était désolé de ne pouvoir le faire sans penser qu’elle le rejetterait, qu’elle n’avait pas envie qu’il la touche ou pire, qu’elle partirait en courant pour aller se laver. Selon les marques qu’il avait vues et sur un seul bras de surcroît, elle avait subit une torsion du bras. Il avait dû vouloir l’intimidé pour qu’elle ne parle pas. Son bras n’était pas brisé, elle aurait eu plus mal quand il avait soulevé son bras. C’était déjà une bonne nouvelle. Elle aurait le bras ankylosé et quelques ecchymoses mais pas de dégâts permanents. Tant mieux. Avant, elle lui aurait dû tout ce qui c’était passé sans vouloir rien lui cacher. Enfin, avant ce fichu rendez-vous chez le médecin qui avait tout gâché entre eux. Il aurait pu se taper la tête sur les murs tellement il se sentait stupide d’avoir voulut prendre se rendez-vous. Il se croyait infertile, il ne pensait pas qu’elle souffrait d’un syndrome qui faisait en sorte qu’ils n’auraient sans doute jamais d’enfant. Elle s’était senti diminuée, il n’avait pas su la faire sentir femme à nouveau. Une pensée qui lui creva le cœur traversa son esprit; Cet homme, celui du restaurant, avait-il réussit là où lui avait échoué? Avait-il fait d’elle la femme heureuse qu’il aurait aimé pouvoir retrouver? Il chassa cette pensée. Il inscrivit les informations sur son papier et se racla la gorge avant de parler à nouveau. Une boule s’était formée et il avait dû la faire passer avant de pouvoir ouvrir la bouche.

-L’armoire de la pharmacie, elle était verrouillée? Il avait l’air d’avoir une clé ou il a forcé la serrure?

Kaleb le faisait toujours, Willow aussi et il savait qu’Olivia n’était pas du genre négligente et n’aurait pas laissé des produits rares se perdre. Mais quand on veut vraiment quelque chose, on peut apprendre où est laissé la clé, on peut trouver un truc pour forcer le verrou aussi. Il penchait pour la clé, sinon Livia n’aurait pas eu besoin de lui. Kaleb et Willow se serait aperçu du bris bien assez vite. Ce ne devait pas être sa première fois. Lenny se souvenait que Kal avait parlé qu’il semblait lui manquer des produits. Mais il n’en avait pas la certitude. Ils avaient bien un inventaire, mais il avait dit qu’il aurait pu oublier de noter ce qu’il avait pris dans une urgence. Il travaillait comme un forcené, c’était normal qu’il oublie certaine chose. Lenny avait au moins réussit à réduire leur tour de garde sans que le doc et les autres ravitailleurs ne semblent vraiment s’en apercevoir. Du moins, il se plaisait à le croire. Ils ne voulaient pas être retirés des tours. Leonard ne comprenait pas leur entêtement. Ils en faisaient déjà beaucoup. Il avait réduit leur tour et quand il aurait une chance, il les retirait tous. Ils prenaient tous les risques pour eux. Amy et Mac étaient revenues blessées, les autres aussi, mais elles étaient les deux plus récentes. Cette pensée lui fit lever les yeux. La femme devant lui, elle le rendait fou et il perdrait bien la tête s’il fallait qu’elle lui revienne blessée un jour. Il devait chasser cette idée de sa tête. Elle ne l’aimait plus et ça ne donnait rien de la harceler de ses sentiments. Il se détestait de ne pouvoir cesser de ressentir ce qu’il ressentait pour elle.

-J’espère qu’il a su te rendre plus heureuse que moi.

Il avait dit ça en la regardant dans les yeux. Il n’y avait aucune colère dans sa voix, il avait changé de sujet radicalement, mais il était sur qu’elle comprendrait. Cette image l’avait hanté bien des nuits par la suite. Il la voyait, riant à gorge déployée. Ou peut-être que son souvenir était déformé par la douleur qu’il avait ressentit et qu’en réalité elle n’avait que rit normalement. Il ne savait plus, ne savait pas. Il secoua la tête.

-Désolé, c’est hors contexte.

Il soupira et regarda ses notes.

-Peux-tu me décrire l’homme qui ta agressé et qui s’est servi dans la pharmacie?

Comme elle n’était pas là depuis longtemps, il était fort possible qu’elle ne connaisse pas son nom. En vérité, il ne connaissait pas le nom de toute la famille du doc avant qu’ils ne lui offrent se rôle. Maintenant oui, mais avant, il n’aurait pu dire le nom de la sœur de Mackenzie, ni celui de la vétérinaire. Pourtant, il était là depuis longtemps.

Voir la tête que faisait Len lui donna envie de rire. Il ne s’attendait certainement pas à ce qu’Olivia ait tenté d’estropier un pauvre homme. Cependant, son envie de rire la quitta brusquement quand elle le vit s’approcher d’elle en ne la quittant pas des yeux. Si Livia se doutait un peu de ce qu’il avait en tête, soit de l’examiner sous toutes ses coutures afin de s’assurer qu’elle ne lui cachait rien ou d’évaluer par lui-même son état général, elle ne s’était pas attendue à ce qu’il pose les lèvres sur son poignet qui arborait maintenant de jolies de marques rouges. Mais Livia n’avait que faire des marques sur son poignet, tout ce qu’elle savait, c’était qu’elle avait dû réprimer le frisson qui l’avait traversée quand son mari l’avait touchée. Elle ne voulait pas qu’il se rende compte qu’elle était toute aussi troublée que lui. Tellement troublée, qu’elle avait à peine entendu les excuses qu’il lui avait faites. La jeune femme ne se ressaisit que lorsqu’elle vit Len regagner sa place et commencer à lui poser une série de questions, sans doute pour faire son rapport à ses supérieurs par la suite.

- Oui, il avait la clef. J’ai réussi à la reprendre quand il était occupé à se lamenter sur ses précieux bijoux de famille. lança la jeune femme avant d’essayer de visualiser le type pour le décrire au mieux à Len. Je dirais qu’il était peut-être à peu près de ta grandeur, mais un peu moins costaud. Il a les cheveux bruns foncés, il porte la barbe. Ah! Et il porte aussi des lunettes.

Elle venait de lui donner la description et la façon dont l'homme s'y était pris. Il était important qu'il trouve le coupable et qu’il trouve une solution pour que pareille situation ne se reproduise plus. Déjà qu’ils peinaient à administrer des soins de base parce qu’ils manquaient de tout, s’il fallait en plus qu’on les déleste de leurs médicaments, ça serait l’enfer sur terre. A supposer que ce n’était pas encore déjà le cas. Elle tenta néanmoins de se concentrer, peut-être qu'un autre détails distinctif lui viendrait à l'esprit. Elle cherchait dans sa tête quelque chose pour aider Len, un indice. Une petite lumière se fit dans sa tête et elle regarda son mari.

- Peut-être que je me trompe, mais je crois qu’il est droitier.

C'était logique non? Il lui avait tordu le bras droit car c'était son bras le plus fort pour la maintenir. Du moins, c'était ce qu'elle pensait de la situation, elle-même aurait utilisé son bras gauche, son bras le plus fort, pour mener à bien ce genre de manœuvre.

- De quoi tu parlais, Len? C’est qui ce «il»?

C'était la question qui avait menacé de franchir ses lèvres lorsqu'il avait émis le souhait «qu'il» avait réussi à la rendre plus heureuse que lui-même avait su le faire. Elle avait su s’arrêter à temps, mais maintenant, Livia voulait savoir. Qui était ce «il» dont il parlait? C'était quoi cette phrase lancée au milieu de leur conversation et qui n'avait aucun lien avec ce dont ils étaient en train de parler? De plus, il s'excusait du hors contexte et continuait comme s'il n'avait rien dit, comme s’il n’y avait pas lieu de s’interroger sur le sens de ce qu’il venait de dire. Livia n'y comprenait plus rien, un peu plus tôt il embrassait les marques sur son bras et maintenant souhait qu'elle ait été heureuse avec un autre que lui. Son cœur battait à tout rompre, elle avait peur de la réponse qu'il lui fournirait, elle n'avait eu personne d'autre dans sa vie, du moins pas de façon vraiment stable. Si elle avait accepté quelques invitations ici et là de la part d’un homme en particulier, elle y avait rapidement mis un terme. Quand il avait tenté de l’embrasser un soir, Olivia avait eu l’impression de tromper Len. Après, elle n’avait jamais retenté le coup. Len était le seul qui avait vraiment compté et maintenant il croyait qu'elle l'avait remplacé pour une raison qui lui échappait complètement.

La jeune femme lui indiqua que l’autre avait une clé et elle avait réussi à la lui reprendre. Il n’était pas surpris qu’elle ait eu la vivacité d’esprit de prendre la clé pour que cet homme n’ait plus accès à l’armoire. La jeune femme lui fit ensuite la description d’un homme, c’était assez précis mais il voyait quand même deux ou trois hommes ayant une description similaire. L’un d’entre eux était son voisin de chambre, enfin, le voisin de chambre d’Olivia. Il allait y faire allusion lorsqu’elle lui fit part que l’homme était droitier sans aucun doute. En effet, il avait fait la clé de bras du côté droit, il était donc logique qu’il soit droitier. Il inscrivit l’information. Encore une fois, il allait répondre quand la jeune femme lui demanda de qui il parlait, qui était ce « il » qu’il avait mentionné. Sa question confirmait ce qu’il pensait déjà, elle n’était pas au courant de sa venue à New York. Il soupira.

-Je vais répondre à ta question, mais avant j’aimerais que tu réfléchisses à quelque chose.

Il posa son crayon sur son bureau avant de la regarder.

-Tu as sans doute rencontré notre voisin de chambre depuis le temps, est-ce que tu crois que l’homme de la pharmacie pourrait être le même? Si non, je l’élimine de la liste, si oui, on aurait notre coupable.

Elle pouvait ne pas y avoir pensé dans le feu de l’action et peut-être qu’elle ne le voyait pas tous les jours. Il espérait pouvoir lui rafraîchir la mémoire et dans le pire des cas, il aurait un suspect en moins. Maintenant, venait le moment de lui annoncer qu’il était allé à New York et que son frère ne lui avait rien dit. Il se redressa avant de s’appuyer au dossier de sa chaise. Il se passa la main au visage avant de la regarder.

-Ton frère était si content de me dire où tu te trouvais, que j’aurais dû savoir avant même d’arriver au restaurent que quelque chose clochait.

Il eut un petit sourire amère en rependant à l’expression réjouit qu’avait eu son beau-frère. Il s’était fait bêtement avoir. Il avait cru que ce dernier était heureux de le voir débarquer, il pensait qu’il ramènerait sa femme avec lui et que son frère lui donnait enfin sa bénédiction. Il s’était fait avoir sur toute la ligne.

-Tu étais dans ce resto, avec un homme. Tu semblais être si heureuse, tu riais à presque tout ce qu’il disait, tu penchais ta tête vers lui. Je …

Il haussa les épaules, il cherchait ses mots et tentait de trouver ce qu’il fallait dire.

-J’ai senti que tu étais bien, j’ai senti que tu étais passé à autre chose. Je suis parti, j’ai choisi de te laisser vivre la tienne. Je me suis lancé dans le travail à fond et j’ai cessé de t’embêter.

L’histoire était banale, mais il sentait maintenant qu’il aurait dû continuer d’essayer. Il n’aurait pas dû abandonner aussi facilement et pourtant, il l’avait fait croyant qu’elle serait plus heureuse ainsi. C’était-il trompé? À voir l’air de la jeune femme, il sentait que oui et son sentiment de culpabilité ne se fit que plus grand. Il n’en laissa rien paraître. Elle aurait déjà assez matière pour le traiter d’idiot, de stupide et de tous les noms. Mais en même temps, c’était elle qui était partie, elle qui avait dit de ne plus jamais la contacter. Elle voulait qu’il l’oublie, mais elle lui avait reproché de ne pas l’aimer, de ne pas être allé la chercher. Que voulait-elle? Qu’il la laisse tranquille ou qu’il aille la chercher? Il s’embrouillait dans toute cette histoire, il ne savait plus quoi penser ni comment réagir.

Leur voisin de chambre? Il en avait de bonnes! Comme si Len pouvait parler de leur chambre, il campait dans son bureau! Olivia se retint de lever les yeux au ciel de peine et de misère, mais elle y parvint grâce à d’immenses efforts de sa part. Plutôt que de riposter qu’elle voulait connaitre la réponse à sa question avant de se concentrer sur le type qui avait voulu se servir dans la pharmacie, elle se concentra sur sa question. Une fois débarrassés de ce sujet, ils pourraient enfin fixer leur attention sur ce fameux «il» dont Leonard parlait. Parce que Livia avait hâte de connaitre le fin mot de l’histoire. Et à voir la tête de son mari, elle comprenait qu’elle n’allait pas particulièrement aimer entendre ce qu’il aurait à lui dire.

Concernant «leur» voisin de chambre, la description collait en effet, mais non ce n’était pas lui. Livia en mettrait sa main au feu. Le type qui avait pris la pharmacie pour un «self service» n’était pas le voisin. Ils se ressemblaient par-contre. On pourrait même dire qu’ils avaient un petit air de famille. Peut-être étaient-ils parents? C’était fort possible que ces deux-là soient frères. Selon les estimations d’Olivia, ils avaient plus ou moins le même âge, c’était donc tout à fait envisageable. C’était, selon la jeune femme, une piste à suivre. Len qui était là depuis longtemps pourrait sûrement être au courant. Ce que la jeune femme ne comprenait pas, c’était que cette armoire ne contenait que des antibiotiques. Avec la fouille du navire échoué, ils avaient pu refaire tranquillement leurs stocks. Si l’homme était un junkie, il ne fouillait clairement pas dans la bonne armoire. Hormis pour se procurer des narcotiques – gardés ailleurs – elle ne voyait pas trop à quoi lui servirait des antibiotiques. Surtout qu’il n’avait même pas l’air d’être malade ou mal en point.

- Non, ce n’était pas lui. Est-ce qu’il aurait un frère ici? Parce que notre voisin et mon service trois pièces ont un air de famille.

Quand enfin arriva le moment où Len lui expliqua de qui il parlait, Olivia ferma les yeux et secoua lentement la tête. C’était du David tout craché. Il n’avait jamais compris comment Livia avait pu rester amie avec Len après la mort de Katy, après qu’elle-même eu faillit y rester. Tout comme il n’avait jamais compris qu’elle était tombée amoureuse de Len et qu’elle s’était mariée avec lui. Si Livia avait pu faire abstraction de ce qui s’était passé, ne jamais reprocher à Leonard ce qui s’était passé – ce n’était pas sa faute en plus – David n’avait jamais pu pardonner. Faire la part des choses. Quand il avait appris les fiançailles du couple, il avait menacé de ne pas y assister, car il ne cautionnait pas la stupidité d’Olivia. Elle avait tout tenté pour le faire changer d’avis, mais il n’en avait pas démordu. C’était leur père qui avait fini par faire comprendre à David que c’était important pour elle qu’il soit présent lors du plus beau jour de sa vie. Livia avait toujours soupçonné son père d’en avoir dit plus que ce qu’il avait bien voulu lui raconter, mais il avait fini par avoir gain de cause. David avait même fait bonne figure sur les photos de mariage.

Quant à l’homme dont parlait Len, Livia n’avait aucune difficulté à l’identifier. Il s’agissait de Joseph un homme tout à fait charmant avec qui elle était sortie à quelques occasions. Un restaurant. C’était leur dernier rendez-vous. C’était la seule fois où ils étaient sortis manger ensembles. Amusant et drôle, Livia s’était toujours beaucoup amusée avec lui, n’eut été de Len, la jeune femme aurait pu craquer pour Joseph. Le problème, c’était que quand il avait tenté de l’embrasser, Olivia avait tout de suite eu l’impression de tromper son mari. Que son frère ait osé faire subir une chose pareille à Leonard la révoltait. Elle qui avait attendu – malgré tout ce qu’elle avait dit – qu’il vienne la retrouver, elle comprenait que son frère avait tout gâché. Maintenant, Len croyait qu’elle avait tourné la page… alors qu’elle était bien prête à admettre – à elle-même uniquement – que ça n’avait encore jamais été le cas.

- Je… je suis désolée que David t’ait fait un coup pareil, mais je tiens à te jurer que j’ignorais tout de ce qu’il a fait.

Olivia poussa un long soupir de lassitude. Son propre frère. Comment avait-il osé lui faire une chose pareille alors qu’il savait combien elle souffrait de cette séparation? Si elle le pouvait, Livia secouerait son frère comme un prunier. Elle l’aimait, il était une des personnes qu’elle aimait le plus au monde, mais jamais elle ne pourrait lui pardonner ce qu’il avait fait subir à Leonard. Jamais.

- C’était qu’un ami, ce n’était pas sérieux. commença-t-elle lentement en fixant ses mains comme si c’était soudainement la chose la plus intéressante au monde. Ç’aurait pu l’être si je n’avais pas eu l’impression de te tromper quand il m’a embrassée ce soir-là.

Elle n’avait pas eu l’intention de lui révéler cette partie de l’histoire, mais il avait fait preuve d’honnêteté en lui racontant ce qui s’était passé pour lui ce soir-là, elle lui devait donc la vérité. C’était le moins qu’elle puisse faire après tout. Une fois que ce fut fait, elle se leva brusquement. C’était une chose de dire à Len qu’elle avait eu l’impression de le tromper, c’en était une autre de rester là à ressasser le passé. Ça ne faisait que leur faire du mal pour rien.

- C’est pas tout ça, mais j’ai du boulot, moi! dit-elle en se dirigeant rapidement vers la porte du bureau. Bye!

Et la jeune femme quitta précipitamment le bureau en priant pour que Len ne l’arrête pas cette fois-ci.

Il prit en note le fait qu’Olivia disait que le voleur et leur voisin de chambre devait avoir un lien de famille. Oui, le voisin de chambre avait un cousin et il devait avouer qu’il les avait pris pour frère la première fois qu’ils les avaient vus côte-à-côte. Une carrure semblable, des cheveux foncés et des traits faciaux qui se ressemblaient. Il ne se souvenait pas de son nom, mais il allait trouver. Sinon, il était sur de trouver quelqu’un qui saurait. Ayana savait laisser traîner ses oreilles, elle était une jeune fille très intelligente et il ne la prenait pas pour une enfant comme les autres le faisaient. Il voulait la protéger, mais il savait qu’elle était débrouillarde et refusait de la voir comme une simple adolescente alors qu’elle vivait par elle-même depuis qu’elle était très jeune. Mais la jeune fille fût vite ranger dans un coin de sa tête lorsque sa venue à New York fût finalement exposée. Olivia sembla vraiment mal à l’aise de la conduite de son frère, elle n’était pas au courant qu’il était allé la voir, il l’avait compris à leur première rencontre dans la chambre. Elle venait de le lui confirmer à présent. Il aurait bien voulu lui dire qu’elle n’avait pas à jurer, qu’il savait simplement à voir son air qu’elle ne savait pas qu’il était allé la voir. Elle ne savait pas mentir, c’était une qualité qu’il appréciait tellement chez elle. Mais elle continua, elle lui indiqua qu’il avait été un idiot car, si elle appréciait l’homme avait qui elle avait diné ce soir là, elle s’était sentie coupable quand il l’avait embrassé, elle avait senti qu’elle le trompait lui avec cet homme. Il aurait souri, mais ce n’était pas approprié du tout. Il se contenta de rester neutre à cette révélation, sans démontrer un manque d’intérêt non plus. Il ne voulait pas qu’elle croit que ça ne lui faisait, mais elle ne voulait pas qu’elle pense qu’il se croyait irremplaçable non plus.

Elle semblait si mal lorsqu’elle lui révéla sa culpabilité pour le baiser. Il le vit dans son visage. Elle se leva précipitamment, il se leva de sa chaise, mais avant qu’il n’ait pu ouvrir la bouche ou même faire un mouvement, elle avait disparu. Il aurait voulu la suivre, lui dire tellement de chose. Mais il ne le fit pas. Elle avait besoin de temps, elle avait besoin d’espace et surtout, elle devait revenir vers lui par elle-même sinon elle se laisserait croire qu’il lui avait forcé la main. Il la connaissait, il avait trop poussé la première fois et il l’avait perdu. Elle avait fui. Il ne ferait pas la même erreur une deuxième fois. Non, il lui laisserait tout l’espace qu’elle voulait mais sans laisser tomber. Il savait maintenant, il savait qu’elle l’aimait toujours. Il n’était pas prêt de l’oublier et surtout, ferait en sorte qu’elle s’en souvienne. Il ferma les yeux un instant, les ouvrit à nouveau avant de s’asseoir dans sa chaise et de laisser passer l’air à nouveau. Il inspira profondément et expira calmement. Un pas venait d’être fait, il le sentait et il n’allait pas se laisser distancer. Il allait prendre son temps, ne brûlerait pas les étapes, mais ne la laisserait pas reculer non plus. C’était hors de question. Il regarda la feuille où il avait pris les informations qu’elle lui avait donnée, il avait un boulot à faire et pour le moment c’était encore la meilleure chose à faire. Il prit la feuille, rassembla les informations et partit à la chasse aux informations. Direction la cuisine, Ayana devait s’y trouver et elle saurait qui était le fameux cousin.