Il avait passé des heures et des heures d’angoisse depuis que sa femme avait subit cette blessure et qu’il avait pris la décision de prendre le risque de la mordre. Il n’avait jamais attendu avec autant d’impatience qu’une fièvre passe. Olivia avait eu des hauts et des bas, des moments de délire complètement effrayant et d’autre moment où elle avait le calme d’un ange. Il avait cru la perdre tellement de fois pendant ce délai, il avait l’impression d’avoir attendu des mois pour qu’elle donne signe d’un quelconque rétablissement. Maintenant, la fièvre était tombée, sa blessure se refermait et aucune infection n’était apparente. Il était soulagé, il attendait qu’elle ouvre les yeux pour la première fois depuis la soirée de la fête foraine. Elle était tirée d’affaire, il le savait depuis que la fièvre avait cessé de ronger la jeune femme. Mais l’attente n’était pas plus agréable ni moins angoissante pour autant. Il eut un petit sourire, son visage était ravagé par la fatigue, il avait les yeux cernés, mais il s’en fichait. Il prit la main de la jeune femme dans la sienne, déposa un baiser sur le dessus de celle-ci avant de lui parler en chuchotant.

-J’ai tellement de chose à t’expliquer, te raconter. Réveille-toi belle au bois dormant, ton crapaud désespère que tu l’embrasses.

Bien sur, il faisait référence à une conversation qu’ils avaient eu où il avait dit qu’il n’était pas le prince charmant et ne le serait jamais. Olivia lui avait dit que les femmes avaient tendance à préférer le crapaud. Il se sentait nerveux, nerveux d’avoir à lui parlé de son nouveau « mode » de vie. Être métamorphe était tout autre chose, elle devrait apprendre à utiliser sa nouvelle force de façon à ce que les humains ne sachent pas à quel point elle était réellement forte, elle devrait s’entourer le moins possible à l’approche de la pleine lune, elle allait vivre sa première transformation, qui serait très douloureuse, elle aurait un chef de meute, lui-même, elle devrait se plier aux règles du conseils, dont il faisait partie. C’était beaucoup de chose à gérer. Puis, il y aurait aussi l’histoire des louveteaux. Il était possible qu’elle n’en ait jamais ou qu’elle ne les porte pas à terme.

Ce serait la partie la moins drôle de la conversation, mais ils n’auraient pas le choix de passer par là. C’était important pour elle, il ne savait pas si sa condition en tant « qu’humaine » resterait la même en tant que métamorphe. Il devait avouer ne pas avoir vécu ce genre de chose, en fait, il n’avait jamais transformé personne donc c’était une grande première pour lui aussi. Il espérait que ce serait plus facile, mais il en doutait, il doutait que la maternité soit plus facile en louve qu’en humaine. Chez les métamorphes, les grossesses étaient encore plus difficiles que chez les humains. Le corps, version humains, n’étant pas nécessairement adapté à la grossesse métamorphes. Il eut un petit soupire et regarda sa femme. Ce ne serait sans doute pas rose tous les jours, ils auraient sans aucun doute des moments difficiles, elle était enfin de retour. Elle était enfin de nouveau SA femme. C’était le plus grand soulagement qu’il n’avait jamais ressenti dans sa vie.

Était-ce la voix de Len qu'elle entendait, qui lui demandait d'ouvrir les yeux? Était-ce lui qui lui demandait de se réveiller d'une voix presque angoissée? Mais qu'est-ce qui se passait? La jeune femme gémit et ouvrit lentement les yeux pour les refermer presque aussitôt. La lumière l'aveuglait en plus du petit bruit de l'eau qui gouttait dans un évier et qui commençait sérieusement à lui donner mal à la tête. C'était un son qu'elle entendait quand elle dormait. Mais... comment elle était arrivée là? Et où était-elle? Tiens, le crapaud qui voulait se faire embrasser. Voilà qui lui rappelait une conversation qu'ils avaient déjà eue. Ou bien elle avait rêvé ça?

- Je... je peux avoir de l'eau?

Elle avait la gorge tellement sèche qu'elle avait du mal à parler. Ce n'est qu'en essayant de se redresser qu'elle eut mal à l'abdomen et que tout lui revint en mémoire. Enfin, des bribes parce que tout était relativement flou dans sa tête. La fête foraine, les tireurs fous. Len qui se transformait sous ses yeux, la balle qu'elle s'était prise, le sang. Les vampires. La promesse de Len de la transformer. Ou la transformation en vampire. Olivia avait suffisamment mal pour qu'elle sache qu'elle n'avait pas rêvé tout ça. Ou fait un cauchemar horrible. Parce que pour être horrible, cette soirée l'avait été. Depuis combien de temps était-elle tombée dans les pommes? Il faisait jour donc elle s'imaginait bien qu'elle n'était pas un vampire et d'un côté, ça l'arrangeait bien. L'idée de boire du sang lui soulevait le coeur. Mais pourquoi n'était-elle pas à l'hôpital? Elle avait quand même pris une balle dans le ventre. Non? Ça ne nécessitait plus de soins médicaux? Et combien de temps s'était écoulé depuis? Tellement de questions lui passaient par la tête qu'elle ne savait pas par quoi commencer.

- Où suis-je? Et qu'est-ce qui s'est passé après que je sois tombée dans les vaps pour de bon?

Il y avait par-contre une chose dont elle se rappelait: elle avait dit qu'elle laissait tomber cette histoire de divorce et comptait bien essayer de sauver son mariage. S'il pouvait encore être sauvé. Elle avait peut-être merdé, mais elle avait à coeur d'essayer de faire en sorte que ça ne finisse pas en fiasco.

Il l’avait entendu gémir, ses yeux avaient papillotés, c’étaient ouverts et avaient ensuite refermés d’eux-mêmes dû à la lumière. Il allait se lever pour aller fermer le rideau lorsque la jeune femme tenta de se lever. Le souffle qui franchit les lèvres de la jeune femme lui indiqua que la situation avait été souffrante. Il se leva et examina doucement la jeune femme, son ventre était encore sensible, la balle avait laissée une trace, une petite cicatrice. Kaleb lui avait assurée que rien de grave n’avait été atteint à l’interne, il avait retiré la balle, lui avait donné une transfusion de sang et ensuite, lorsqu’elle avait été stable, Leonard l’avait mordu. Après l’avoir examiné, il parla finalement.

-Je vais te chercher de l’eau. Ne bouge pas.

Il déposa un baiser sur son front avant de partir rapidement, prendre une bouteille d’eau froide dans le frigo et de revenir rapidement dans la chambre, il en profita pour fermer le rideau avant que les yeux de la jeune femme s’habitue à leur nouvel acuité. Il déplaça ensuite les oreillers de la jeune femme la soulevant en douceur, il s’installa confortablement dans le lit avant de reprendre la bouteille d’eau, qu’il avait déposé sur la table de nuit avant de redresser Olivia, et l’ouvrir pour la lui donner.

-Bois lentement, par petite gorgée. Tu n’as rien avalé d’autre que le soluté que Kaleb t’a installé, il l’a retiré hier quand la fièvre est tombée. Il est possible que ça ne passe pas bien au début si tu vas trop vite.

Elle lui avait aussi demandé avant qu’il ne quitte la chambre pour aller chercher son eau, ce qui s’était passé après qu’elle soit tombée dans les vaps. Il se passa une main dans les cheveux, il rapprocha encore un peu la chaise qui était près du lit, s’y installa avant de regarder la jeune femme.

-Nous avons su que plusieurs endroits dans la foire avaient été visés par les chasseurs. Ce sont eux qui nous ont attaqués. Nous avons réussi à leur échappé, mais plusieurs n’ont pas eu cette chance. Dès que nous avons pu, nous t’avons ramené ici, dans notre maison, Kaleb t’a soigné … et quand tu as été assez bien pour que Kal me donne le « ok », j’ai fait ce que tu as demandé. Alors j’espère que tu n’as pas changé d’idée, car je t’ai mordu, tu as survécu à la fièvre et tu subiras ta première transformation dans très peu de temps puisque la pleine lune est proche.

Soudainement, une peur sourde le prit au ventre. Et si elle avait changé d’avis? Si elle n’avait dit ça que pour lui faire plaisir? Si elle n’avait pas vraiment envie de revivre avec lui, si elle n’avait pas vraiment envie d’abandonner les papiers du divorce? C’était peut-être seulement la peur de mourir qui l’avait fait dire toutes ses choses là. Le doute l’assaillait. La panique grandissait dans son ventre, comme une mauvaise graine qui pourrait trop rapidement. Tellement de si, de mais, n’aurait pas dû lui passait dans la tête à toute vitesse. Il se passa les deux mains au visage, frotta vigoureusement avant de regarder la jeune femme. Qu’avait-il fait? Elle ne pourrait plus revenir en arrière. Comment avait-il pu être aussi idiot!